Lundi 27 Novembre 2023
Séance CINE-PHILO
Lundi 18 Mars de 17 h à 20 h
INDISCRETIONS
Comédie, Romance De George Cukor
(Etats-Unis), 1940, 1h53
Ciné-philo UIA - Écume des films
Une comédie pour stimuler une réflexion philosophique sur le bonheur ? Qui plus est, une comédie hollywoodienne ! C’est le défi que nous relevons, à la suite de Stanley Cavell, le premier philosophe à avoir élaboré une réflexion approfondie sur le cinéma américain et qui avait « bien conscience de prêter le flanc au scandale en examinant […] des films hollywoodiens à la lumière des grands textes philosophiques ».
Après avoir rejeté son premier mari Dexter (Cary Grant), Tracy, fille de la haute société de Philadelphie, s’apprête à épouser le très conventionnel George, homme d’affaires qui voit en elle un objet parfait dont l’image contribuera à ses ambitions. Seulement, à la veille du mariage, Dexter réapparaît, pour la plus grande joie de Dinah, la petite sœur de Tracy, qui trouve qu’avec Dexter, la vie est bien plus drôle. Il se fait accompagner de deux journalistes venus incognito couvrir la cérémonie. Le vernis de conventions qu’on s’amuse à respecter sans que personne ne soit dupe laisse assez vite place à des explications plus rudes et à une vraie discussion entre les ex-époux sur ce qui a pu produire une déception partagée (et peut-être un fiasco) et conduire Tracy (Katharine Hepburn) à épouser un homme que Dexter ne trouve pas du tout digne d’elle.
Dans le chapitre consacré à ce film dans son livre “A la recherche du bonheur - Hollywood et la comédie du remariage »”, Stanley Cavell éclaire l’entreprise de Dexter : compter sur une « conversation assortie », sans complaisance mais sans le poison du ressentiment, pour faire entendre à la trop sublime Tracy qu’elle se fourvoie tant qu’elle ne renoncera pas à l’image de la perfection qu’elle veut donner aux autres et… à elle-même.
Ce film, aux dialogues étincelants et si justes, au rythme enlevé et euphorisant, est une invite assez jubilatoire à une réflexion sur la quête du bonheur. Celle-ci passe, lorsqu’on prend conscience d’une impasse ou lorsqu’un être qui vous estime vous « ouvre les yeux », par une transformation de soi. Pour Cavell, ceci suppose de « contrôler sa propre expérience », c’est-à-dire lui accorder toute son attention et discerner en elle ce qui importe pour soi, ce qui compte pour soi. Ne serait-ce pas cette confiance accordée à sa propre expérience qui donne l’audace de prendre le risque du bonheur ?
Date de dernière mise à jour : 13/03/2024